“No et moi” de Delphine DE VIGAN (lecture d’Aurélie TORCHE et Antoine DRONNE)
Delphine de Vigan, auteur de quatre romans, Jours sans faim (2001, sous le pseudonyme de Lou Delvig), Les jolis garçons (2005), Un soir de décembre (2005), vient de publier No et moi. Ce dernier roman nous parle d’une petite fille de treize ans, Lou Bertignac, meilleure élève de sa classe de seconde. Un jour, Lou doit faire un exposé. Elle choisit de s’intéresser au parcours d’une jeune femme SDF. Comme à son habitude, elle se rend à la gare d’Austerlitz, afin « d’observer l’émotion des personnes », comme elle dit. Lou est interpellée par No, 18 ans, SDF depuis plus d’un an et qui lui demande « une clope ». Une réelle histoire d’amitié naît alors entre elles sans que l’une ne l’avoue vraiment à l’autre. A travers ce roman, le lecteur découvre la vie quotidienne de No, faite d’inquiétudes et de « galères »: Où dormir ? Comment se débrouiller pour manger ? Comment se protéger des agressions ? L’auteur nous raconte ainsi la plongée dans la misère qui Conduit No à l’oubli de soi: pas assez présentable pour trouver du travail, pas de travail pas d’argent, pas d’argent pour être présentable. Seule Lou lui permet de conserver un semblant de vie sociale, de croire qu’elle existe parce que quelque un peut penser à elle. Lou est une sorte de parenthèse apaisante dans sa vie jusqu’au moment où cette histoire d’amitié prend fin, sur le quai d’une gare. Leurs chemins se séparent définitivement comme Pour nous dire que le monde de Lou et celui de No ne pouvaient cohabiter, malgré l’espoir. Une fin qui peut sembler brutale, loin du « happy end » que l’on serait tenté d’attendre mais, finalement, la seule fin possible et crédible. Dans ce récit, on appréciera le point de vue adopté, le point de vue que Lou porte sur le monde teinté à la fois de naïveté et de lucidité, le style de l’auteur, son écriture légère qui Parvient à nous toucher sans pour autant tomber dans le pathétique. Ce roman, malgré la gravité du sujet qu’il aborde, ne peint pas seulement la noirceur du Monde de la rue, avec sa violence. On y perçoit, par moments, des petits sourires, des touches humoristiques qui allègent le récit comme lorsque Lou se demande dans quel sens il faut tourner la langue pour embrasser. Delphine de Vigan n’oublie donc pas de procurer du plaisir au lecteur sans pour autant chercher à le séduire.
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